Cadre légal et médical en Suisse
Changement de sexe et de prénom à l’état civil
Depuis le 1er janvier 2022, la Suisse applique pour le changement légal de sexe et de prénom une procédure simplifiée et fondée sur l’autodétermination. Toute personne résidant en Suisse et âgée de 16 ans ou plus peut modifier légalement son genre (homme ou femme) ainsi que si souhaité son prénom et son nom de famille (si celui-ci est genré) en effectuant une déclaration à l’état civil, sans nécessiter d’examen médical, de diagnostic psychologique ni d’intervention chirurgicale. Pour les personnes de moins de 16 ans, ou sous curatelle/tutelle, la démarche doit se faire avec l’accord des représentant-x-es légaux/légales.
Les étapes : remplir le formulaire en ligne de « modification du sexe dans le registre de l’état civil » (disponible sur les différents sites cantonaux), à renvoyer avec les divers documents demandés. Puis un rendez-vous vous seras proposé par l’officier-ère de l’état civil afin d’attester votre demande par une signature. La procédure coûte entre 75 CHF et 105 CHF dans la Canton de Vaud.
La demande peut être refusée en cas d’abus manifeste ou de manque de discernement attesté.
Actuellement il n’existe pas d’option non-genrée sur les papiers d’identités suisses ( ex : « X », « neutre »). Ainsi certaines personnes décident de modifier uniquement leur prénom à l’état civile, afin qu’il corresponde mieux à leur identité de genre.
Concernant uniquement le changement de prénom, la situation en Suisse reste largement dépendante de l’appréciation des autorités en charge de l’état civil selon les cantons.
Dans le canton de Vaud, un arrêt de 2006, reconnu aussi par d’autres cantons, fait jurisprudence. Il stipule que vivre durablement dans le rôle social opposé à votre état civil (sexe « légal ») est reconnu comme « un juste motif » pour adopter un prénom correspondant. L’Office fédéral d’état civil n’a pour sa part pas clarifié par circulaire à quelles conditions un changement de prénom sans changement de la mention du sexe pourrait être obtenu.
Mais les autorités vaudoises connaissent et se soucient des difficultés et des risques auxquels les jeunes trans ou non binaires sont exposés lorsque leur prénom contredit leur expression sociale de genre. Pour les enfants et les adolescent-x-es, l’Office cantonal de l’Etat civil accepte le changement de prénom aux conditions ci-après.
Vous êtes domicilié-x-e dans le canton de Vaud
Vous pouvez adresser une demande écrite à la Direction de l’état civil et accompagner votre demande de pièces justificatives, notamment une évidence du changement de genre social, familial ou scolaire. Plus l’enfant est jeune, plus le soutien des parents sera important pour l’issue de la démarche. Une attestation médicale confirmant, si c’est le cas, le suivi du/de la jeune en raison de son identité de genre n’est pas exigée. Elle peut être remplacée par une lettre de recommandation de la Fondation Agnodice.
Direction de l’état civil
Rue Caroline 2
1003 Lausanne
021 316 89 79
Vous êtes domicilié-x-e dans un autre canton
Si vous êtes dans ce cas et qu’il s’agit d’un·e jeune de moins de 18 ans, la Fondation Agnodice peut vous conseiller dans ces démarches qui peuvent s’annoncer plus complexes. Si vous avez plus de 18 ans, adressez-vous au Checkpoint du Pôle trans de la Fondation Profa à Lausanne.
Transition sociale à l’école ou au travail
La transition sociale de genre est légale en Suisse à n’importe quel âge. Cela s’applique tant à l’école qu’en formation professionnelle ou en cours d’emploi. La Suisse s’est engagée dès 2010 auprès du Conseil de l’Europe, à promouvoir à l’école le respect et la tolérance de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre (CM/Rec(2010)05, par. 32). Ceci est cohérent aussi avec l’esprit de la déclaration des droits de l’Homme, de la Convention des droits de l’enfant et de la Constitution Fédérale.
De même, certaines lois cantonales, telles que la Loi sur l’Enseignement Obligatoire (LEO) pour Vaud, ou certains codes de déontologie (ex. LCH 2008) soulignent le devoir de lutter contre les discriminations tant de la part des enseignant·es que des élèves et incluent parfois spécifiquement l’égalité des sexes et des orientations sexuelles.
Pour le canton de Vaud la décision 187 de la Cheffe du Département de la formation, de la jeunesse et de la culture (DFJC) intitulée « Accompagnement des élèves trans* et non binaires dans la scolarité obligatoire et postobligatoire » pose les bases légales et le cadre professionnel de ces accompagnements.
En Suisse romande, la Fondation Agnodice intervient directement auprès des autorités scolaires compétentes, dans les écoles, les centres professionnels, afin d’accompagner et soutenir les élèves transgenres ou non binaires qui s’y trouvent. N’hésitez pas à nous contacter pour mettre en place l’intervention la plus adéquate. Nous pourrons vous conseiller au mieux et vous expliquer les démarches et interventions que nous pratiquons habituellement. La lecture de notre guide vous permettra de mieux comprendre notre action au niveau scolaire et professionnel : Téléchargez le guide de bonnes pratiques.
Assurance et remboursement
En Suisse, l’assurance maladie de base (LAMal) prend en charge une partie importante des soins liés à la transition de genre, dès lors qu’ils sont reconnus comme médicalement nécessaires. Cela peut inclure le diagnostic, le suivi psychothérapeutique, les traitements hormonaux, certaines interventions chirurgicales (comme la chirurgie génitale, l’augmentation mammaire ou la chirurgie faciale) ainsi que l’épilation définitive dans certains cas. Ces prestations doivent être prescrites dans le cadre d’un accompagnement médical global et respecter les critères définis par la loi (article 32 LAMal) : être efficaces, appropriées et économiques.
Aucun traitement ou chirurgie n’est exigé pour accéder à ces soins. Il est recommandé de discuter avec les professionnel-x-les de santé pour constituer un dossier adapté, et en cas de refus de prise en charge, un recours est possible.
Les éventuels frais ultérieurs de chirurgies d’une personne trans ou non-binaire sont aussi pris en charge par la couverture de base, à condition que l’entier des soins soit dispensé dans un hôpital public et que l’assurance ai confirmé son accord au préalable.
En s’appuyant sur une jurisprudence des années 80, certaines assurances maladie s’opposent encore à une prise en charge pour des personnes de moins de 25 ans. Cette condition est de plus en plus considérée comme irrecevable et un recours contre un tel refus sera généralement couronné de succès. Si vous rencontrez un refus de votre assurance en raison de votre jeune âge, vous devez faire recours rapidement. La Fondation peut vous conseiller et vous orientera, selon votre dossier, vers les spécialistes du service juridique de l’association suisse TGNS.
De nombreuses personnes trans et non-binaires préfèrent, lorsqu’elles en ont les moyens financiers, se faire opérer à leurs frais à l’étranger. Il est parfois possible d’obtenir un remboursement de l’équivalent des frais d’hospitalisation en chambre commune suisse.
Prise en charge médicale
La transidentité n’est plus considérée comme une maladie par l’OMS depuis 2022. Elle est désormais reconnue comme une variation de la diversité humaine. En Suisse cependant, un diagnostic médical (notamment « l’incongruence de genre » dans la CIM-11) est encore souvent nécessaire pour accéder à certains soins et obtenir leur remboursement par l’assurance. Ce diagnostic ne vise plus à pathologiser, mais reste une étape administrative dans le parcours de transition.
Avant la puberté, une transition sociale (changement de prénom, pronom, expression de genre) peut aider à soulager une détresse liée à la dysphorie de genre. Il est important que cette démarche soit accompagnée avec souplesse, bienveillance et sans pression, afin de laisser à l’enfant l’espace nécessaire pour explorer son identité à son rythme. Chez les jeunes enfants, un accompagnement familial est souvent le plus adapté, tandis qu’à l’approche de la puberté, un soutien psychothérapeutique devient essentiel, notamment pour envisager certaines étapes médicales comme un éventuel blocage pubertaire. La Fondation Agnodice peut vous orienter dans ces démarches.
Certains jeunes peuvent évoluer dans leur compréhension d’elleux-mêmes au fil du temps, y compris revenir à une identification en lien avec le genre qui leur a été assigné à la naissance, et cela doit également être accueilli avec le même respect.
Le retard de puberté
Au début de la puberté (stade Tanner II-III), il est possible d’administrer un traitement (GnRHa) qui bloque temporairement l’action des hormones sexuelles. Ce traitement suspend le développement des caractères sexuels secondaires, souvent source de souffrance psychique (dysphorie de genre) chez les jeunes trans et non-binaires. Il permet ainsi de créer un espace-temps sécurisé pour poursuivre le travail thérapeutique, en laissant au jeune la possibilité de réfléchir à son identité de genre. Ce délai leur donne la possibilité de faire un choix éclairé, généralement autour de 15-16 ans, sur la manière dont elles/ils/iels souhaitent que leur puberté se poursuive.
Les conditions suivantes sont généralement requises par les médecins :
- Un suivi psychothérapeutique
- L’accroissement des symptômes (notamment la dysphorie) juste avant la puberté
- La stabilisation d’éventuels problèmes médicaux ou sociaux connexes
- Le consentement éclairé de l’adolescent-x-e et de ses parents
- Commencer si possible aux tous premiers stades de la puberté (stade Tanner II-III)
L’hormonothérapie
L’hormonothérapie d’affirmation de genre consiste à administrer des hormones sexuelles (œstrogènes ou testostérone) pour déclencher les changements corporels correspondant au genre avec lequel la personne s’identifie. Ce traitement permet, par exemple, le développement de la poitrine, de la pilosité, ou la modification de la voix, selon les cas.
Avant de commencer, un bilan médical complet, notamment sanguin, est réalisé pour vérifier que le traitement est adapté. La mise en place de l’hormonothérapie se fait en concertation avec un-e endocrinologue (pédiatrique pour les adolescent-x-es), et les effets apparaissent généralement après 2 à 3 mois, mais continuent à évoluer progressivement sur plusieurs années. Ce traitement est réversible dans les premiers mois, mais certains changements deviennent ensuite permanents. Il doit être poursuivi à vie uniquement si les gonades (testicules ou ovaires) ont été retirées, car dans ce cas, le corps ne produit plus d’hormones sexuelles naturellement.
Préalablement au traitement, il est important d’approfondir les options de préservation de la fertilité avec les professionnel-x-les de la santé qui vous accompagnent.
Les interventions chirurgicales
La chirurgie, tout comme l’hormonothérapie, n’est ni une obligation ni un passage nécessaire pour être reconnu-e-x dans son identité de genre. Chaque personne trans a un parcours unique : certain-x-es ressentent le besoin d’accéder à des interventions médicales, d’autres non, et les deux choix sont tout à fait légitimes. Ce qui compte, c’est que chacun-x-e puisse définir librement son rapport à son corps et à son genre, sans pression ni condition pour être respecté-x-e dans son identité.
De plus, la chirurgie des organes génitaux et la stérilisation subséquente ne sont aujourd’hui plus exigibles par le tribunal comme condition au changement d’état civil.
Tout acte chirurgical ne sera effectué que sur présentation d’un certificat médical pluridisciplinaire d’un-e psychiatre et d’un-e endocrinologue, spécialement pour les mineur-x-es.
Différentes conditions s’appliquent selon le type d’intervention.
- Mammoplastie de féminisation : intervention visant à augmenter le volume des seins en y insérant des implants. Cette opération ne peut être entreprise qu’après 18 ans et la personne doit être sous hormonothérapie féminisante depuis au moins 1 année.
- Torsoplastie : intervention visant à reconstituer un torse. Avec l’accord parental, cette opération peut être entreprise avant 18 ans, mais certains médecins ou assureurs exigent une hormonothérapie masculinisante depuis au moins 3 mois.
- Hystérectomie : intervention visant à retirer le système ovarien et l’utérus. Cette opération ne peut être entreprise qu’après 18 ans, et sous condition d’une hormonothérapie masculinisante depuis au moins 1 an.
- Chirurgie génitale d’affirmation du genre : intervention visant à transformer les organes génitaux du sexe d’assignation à la naissance en ceux du sexe désiré, soit une vaginoplastie pour les femmes trans et une phalloplastie (ou une métoidioplastie) pour les hommes trans. Ces opérations ne peuvent être entreprises qu’après 18 ans, sous condition d’une hormonothérapie d’au moins 1 an et, en principe pour le remboursement par l’assurance de base, d’un suivi psychothérapeutique attesté.
Contacter directement un-x-e professionnel-x-le de santé expérimenté-x-e et d’approche affirmative
Beaucoup d’informations utiles figurent également sur le site de l’association faitière suisse TGNS, accessible en cliquant sur ce lien