La prise en charge médicale

Le parcours décrit ci-dessous est un parcours type. La détection précoce et, en cas de persistance de la transidentité, le retard puis le déclenchement de la puberté dans le genre de préférence, présentent le meilleur pronostic d’insertion sociale, professionnelle et affective pour les jeunes adultes trans. Chaque situation étant singulière, il est possible d’entrer dans ce processus à tout moment, ce qui peut ajouter certaines complexités.

Entre 0 et 10 ans

La majorité des spécialistes de la santé transgenre estiment qu’il ne faut pas médicaliser les enfants transgenres et que l’OMS aurait mieux fait de ne pas inclure un diagnostic d’incongruence de genre chez l’enfant dans la version 11 de l’ICD.

Dans cette tranche d’âge, un changement de genre familial ou social et scolaire peut être nécessaire pour soulager la dysphorie de l’enfant mais il doit être introduit de manière souple et réversible car certains enfants peuvent, et doivent pouvoir, se repositionner ultérieurement dans le genre correspondant à leur sexe assigné à la naissance.

La Fondation offre aux familles un soutien et des services adaptés:

  • Accompagnement du changement de genre à l’école
  • Groupe de parents autogéré
  • Conseils et orientation selon besoin

Un suivi régulier, peu fréquent si tout va bien, par un·e thérapeute de famille ou un·e psychologue systémicien·ne de l’enfance est utile, ne serait-ce que pour produire un rapport documentant l’évolution de l’enfant durant ces années. Celui-ci justifiera le passage à l’étape suivante, l’induction hormonale d’un retard de puberté.

En effet, les enfants trans, malgré le soulagement obtenu en fonctionnant dans leur genre de préférence, expérimentent juste avant la puberté le retour d’une dysphorie plus ou moins intense qui confirme leur besoin d’induire le retard de puberté.

Entre 10 et 15-16 ans

  • de 10 ans à 12-13 ans (stade Tanner II-III): le soutien psychothérapeutique s’intensifie pour aider l’enfant et sa famille à faire face au mal-être annonciateur de la puberté. Vers 11-12 ans (début du stade Tanner II) il est bon de consulter un·e endocrinologue pédiatre en anticipant le besoin du retard de puberté. Ceci d’autant plus que certain·es endocrinologues pédiatres n’entrent pas en matière pour un retard de puberté sans une expertise pédopsychiatrique (qui prendra du temps) alors que d’autres se satisfont du rapport de suivi du psychologue et/ou du pédiatre qui, idéalement, a suivi l’enfant depuis des années.
  • de 12-13 ans à 15-16 ans: sous réserve de l’accord des parents, l’endocrinologue pédiatre induit un retard de puberté par injection mensuelle de GnRHa (Triptorelin, ex. Decapeptyl 3.75mg). Ce traitement, réversible à tout moment, permet de contenir la dysphorie, d’éviter l’apparition de caractères sexuels secondaires adverses irréversibles, et d’utiliser ces quelques années supplémentaires comme une aide à la décision très utile. Il permet au jeune et au psychothérapeute de clarifier toute confusion ou questionnement résiduels sans être pressés par le temps, jusqu’à ce que le patient atteigne l’âge du consentement éclairé. De plus, cette tranche d’âge, charnière au niveau du développement cognitif et émotionnel, est idéale pour travailler sa définition identitaire en tant qu’être sexué, ce qui est riche et déterminant pour toute sa vie affective et sexuelle future. Les options de préservation de la fertilité seront approfondies également.

Vers 14-15 ans

Le consentement éclairé peut être attesté avec certitude et le ou la jeune trans est à même de s’autodéterminer en toute connaissance de cause. L’endocrinologue pédiatre, parfois en lien avec l’endocrinologue adulte, déclenche la puberté correspondant au genre ressenti. Dans ce cas, d’éventuels gestes chirurgicaux s’ils s’avèrent nécessaires, ne seront pas entrepris avant 18 ans.

La chirurgie

  • A partir de 14 ans, la seule intervention envisageable concerne une éventuelle mastectomie chez un jeune garçon trans (assigné au féminin à la naissance)  qui n’aurait pas bénéficié du retard de puberté, serait sous testostérone depuis plusieurs mois et intégré dans son genre de préférence. Cette opération précoce peut apporter un soulagement considérable, surtout en cas de fort développement mammaire. Elle peut être acceptée par l’assurance de base. Elle est plus complexe qu’une réduction mammaire et doit être effectuée par un·e plasticien·ne expérimenté·e en chirurgie transgenre. Agnodice peut orienter à cet égard.
  • La chirurgie génitale (vaginoplastie ou phalloplastie) n’est pratiquée en Suisse qu’à partir de 18 ans. Par contre, certaines assurances de base tentent parfois de s’appuyer sur une jurisprudence ancienne pour la rejeter jusqu’à 25 ans. Une telle position ne résiste pas aujourd’hui à un recours. Cette chirurgie complexe exige une compétence spécialisée et une solide expérience. Certain·x·es préfèrent l’accomplir dans des centres de compétences à l’étranger ce qui, en l’état de la situation juridique, est rarement pris en charge par l’assurance de base. Parfois le remboursement limité au tarif journalier d’hospitalisation dans les limites de la LAMal suisse.

Agnodice estime empiriquement qu’en Suisse, environ 80% des hommes trans préfèrerait ne pas effectuer de phalloplastie et que près de 50% des femmes trans choisirait de ne pas effectuer de vaginoplastie.

La chirurgie des organes génitaux et la stérilisation subséquente ne sont aujourd’hui plus exigibles par le tribunal comme condition au changement d’état civil.

Vidéo

Extrait du Symposium – 10 ans de la Fondation Agnodice

Protocole d’Amsterdam; le retard de puberté et son action (par Peggy Cohen-Kettenis) – 32:22